Page:Schwob - Mœurs des diurnales, 1903.djvu/51

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

d’autruches, sauf pour leur grandeur, qui est extraordinaire. Ce sont des oiseaux immenses dont la seule vue inspire la terreur : mais ils sont consacrés à leur Dieu dont je n’ai pu savoir le nom. Ils ont un bec noir qui s’ouvre largement et des ailes qui s’éploient autant que les voiles des plus grands navires ; leur clameur est effroyable et fait résonner l’île entière. Leurs prêtres s’imaginent même que la voix de ces oiseaux retentit sur toute la terre connue. La voracité de ces animaux ne peut se décrire. Cependant leurs gardiens veillent à cet égard : parce que si on ne les maintenait dans les limites sacrées ils dévoreraient jusqu’aux habitants et principalement les matières précieuses, pour lesquelles ils ont un goût incroyable. À certaines époques, quelques-uns des plus riches habitants se voient contraints, sous peine de voir leurs propriétés dévastées, de leur offrir des sacs d’or qu’ils engloutissent rapidement[1] ; mais d’ordinaire leur nourriture se compose de bruits que leurs gardiens produisent devant eux avec des trompettes et des tambours, dont ils sont fort avides ; et leur mangeoire contient quantité de plumes d’oie fraîchement arrachées. Ils

  1. Ici Publicola cite « Auri sacra fames ».