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Page:Schwob - Mœurs des diurnales, 1903.djvu/76

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sa pipe, qu’il alluma au briquet, en protégeant soigneusement l’amadou de son pouce. C’est toute une histoire. On nous avait fait stationner en 1878 de février à mai dans les eaux de Rarotonga, Pacifique Ouest. Un des copains avait eu l’ingénieuse idée de monter un petit trafic de copra. Mon Dieu, dans ce temps-là, ça n’était pas difficile. Je crois bien que maintenant on serait plus sévère, mais il y avait un tas d’Anglais qui ne faisaient que ça sur leurs schooners. Avec deux trois paquets de tabac et un coup de pied au derrière, les noirs vous apportaient votre tonneau de copra. C’est brun ; c’est huileux ; ça ne sent pas la rose ; mais, après tout, ça vaut un joli denier quand c’est vendu en Europe. Enfin, bref, nous avions frété une goëlette qui devait aller livrer à San Francisco, et la marchandise était commandée. Pendant que nous l’attendions, nous recevons dans le coin de la gueule un de ces cyclones — non, mais là, vous savez, un coup de torchon soigné. Nous étions sur trois ancres : mais on sentait tout ça tendu… à sauter d’un coup de tan jusqu’à Tahiti. Et, pendant trois jours, dans l’eau verte et le ciel noir, et vive la joie ! — Bon. — Nous ressortons de là. Mon vieux, là, l’île était comme