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IVANHOÉ.

le paiement de mille couronnes te fait-il oublier le danger de ta fille ?

Le juif se dressa sur ses pieds.

— Non, bon Richard, non, dit-il, je pars à l’instant ; adieu, toi que je ne puis appeler honnête, mais dont je n’ose ni ne veux dire du mal.

Toutefois, avant le départ d’Isaac, le chef des outlaws lui donna ce dernier avis :

— Sois libéral dans tes offres, Isaac, et n’épargne pas ta bourse pour l’amour de ta fille ; crois-moi, l’or que tes lésineries t’empêcheront de donner dans l’intérêt de son sort te causera autant d’angoisses dans l’avenir que si on te le versait fondu dans le gosier.

Isaac poussa un profond gémissement, et partit accompagné de deux gigantesques forestiers, qui devaient lui servir à la fois de guides et de protecteurs à travers la forêt.

Le chevalier Noir, qui avait suivi avec beaucoup d’intérêt ces divers incidents, prit alors congé des outlaws ; mais il ne put s’empêcher d’exprimer son étonnement de voir tant de règles administratives parmi des gens privés de la protection des lois et qui en avaient secoué le joug.

— Le bon fruit, messire chevalier, dit le yeoman, croît quelquefois sur un mauvais arbre, et des temps mauvais ne produisent pas toujours un mal sans mélange. Au nombre de ceux qui sont entraînés dans cet état d’insubordination, il y en a sans doute beaucoup qui veulent apporter quelque modération jusque dans leur licence, et d’autres peut-être qui regrettent d’être forcés de poursuivre un pareil métier.

— Et, si je ne me trompe, je parle maintenant à un de ces derniers, dit le chevalier Noir.

— Sire chevalier, reprit l’outlaw, chacun de nous deux a son secret. Vous êtes libre de vous former un jugement sur moi, et, moi, je puis faire des conjectures à votre égard, bien que le trait de chacun de nous n’atteigne peut-être pas le