Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, première partie, 1654.djvu/304

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Cependant, le jour du combat eſtant arrivé, il fut prendre congé d’elle, avec une joye ſur le viſage, qui devoit l’aſſurer de ſon Triomphe. Je viens, Madame, luy dit il, vous demander des armes pour combattre Artane : je voudrois bien (luy reſpondit elle fort obligeamment, mais avec un peu plus de melancolie qu’il n’en avoit) avoir trouvé les moyens de vous rendre abſolument invincible : Vous le pouvez aiſément Madame, adjouſta t’il, me faiſant ſeulement l’honneur de recevoir favorablement les ſervices que je veux rendre au Roy & à vous : & me faiſant ſimplement la grace, de me deſirer la Victoire. Car ſi j’obtiens cette faveur, quand Artane ſeroit le plus vaillant homme du monde, ce que je ſuis bien aſſeuré qu’il n’eſt pas ; je le vaincrois infailliblement. S’il ne faut que de ſa reconnoiſſance pour vos ſervices, repliqua la Princeſſe, & pour des vœux vous faire triompher ; allez Artamene, allez ; & ne craignez pas d’eſtre vaincu. Apres cela, la Princeſſe comme ſi elle n’euſt pû ſouffrir davantage cette converſation, le congedia d’une maniere fort civile & fort obligeante : & Artamene s’en alla retrouver le Roy, qui eſtoit preſt à partir.

Ciaxare ne fut ſuivy que de deux mille hommes non plus que l’autre fois : & les Rois de Pont & de Phrigie ſe rendirent auſſi avec pareil nombre de gens, dans cette meſme Plaine, & au meſme lieu, où les Juges avoient prononcé leur Arreſt ; c’eſt à dire à la veüe du Trophée d’Artamene. L’on y avoit dreſſé des Barrieres, qui formoient un quarré plus long que large, de grandeur aſſez raiſonnable, pour y pouvoir faire un combat : Artane qui ſe trouvoit aſſez embarraſſé de ſon eſpée, ne voulut point avoir d’autres armes offenſives : &