Page:Sedaine - Théâtre.djvu/381

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pour être convaincu de l’avantage que toute femme peut avoir sur son mari ? et si j’étais plus jolie et plus spirituelle…

M. DÉTIEULETTE.

Cela ne se peut pas.

LA MARQUISE.

Encore, monsieur, ne me suis-je servie que de nos moindres ressources. Que serait-ce si j’avais fait jouer tous les mouvements du dépit, les accents étouffés d’une douleur profonde, si j’avais employé les reproches, les larmes, le désespoir d’une femme qui se dit outragée ? Vous ne vous doutez pas, vous n’avez pas d’idée de l’empire d’une femme qui a su mettre une seule fois son mari dans son tort. Je ne suis pas moins honteuse du personnage que j’ai fait : je n’y penserai jamais sans rougir. Ma petite idée de vengeance m’a conduite plus loin que je ne voulais. Je suis convaincue que le désir de montrer de l’esprit ne nous mène qu’à dire ou à faire des sottises.

M. DÉTIEULETTE.

Quel nom donnez-vous à une plaisanterie !

LA MARQUISE.

Ah ! monsieur, en présence d’un étranger, que j’ai cependant tout sujet de croire un galant homme.

M. DÉTIEULETTE.

Et le plus humble de vos serviteurs.

LA MARQUISE.

J’ai jeté une sorte de ridicule sur mon mari, sur monsieur de Clainville ; car vous savez ma petite finesse à votre égard.

M. DÉTIEULETTE.

Je la savais avant.

LA MARQUISE.

Quoi ! monsieur, vous saviez…