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Page:Segur - La Fortune de Gaspard.djvu/175

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plus léger blâme contre M. Féréor. Soumission parfaite, admiration profonde, dévouement absolu, respect constant, tels furent les sentiments que Gaspard faisait toujours paraître pour M. Féréor. Cet homme, qu’on trouvait dur, orgueilleux, égoïste, fut enfin touché des avantages que lui offraient l’intelligence et l’affection de Gaspard. Il n’avait jamais rencontré de véritable dévouement, d’affection vraie, de reconnaissance sincère. Ses bienfaits avaient toujours été payés d’ingratitude. Partout il avait vu l’intérêt personnel l’emporter sur le devoir. Cet égoïsme général l’avait rendu sévère jusqu’à la dureté, inexorable jusqu’à l’inhumanité, dédaigneux jusqu’à l’orgueil. La méfiance et l’égoïsme régnaient seuls dans son cœur qui ne s’était jamais ouvert à aucun sentiment affectueux. Ce qu’il voyait de la conduite de Gaspard, ce qu’il savait de ses sentiments, le disposèrent favorablement en sa faveur. Il résolut de lui donner une position plus indépendante que celle de simple ouvrier ; il le chargea de la direction d’un atelier de bobines, et d’une surveillance générale des ateliers de fils et de laiton.

Gaspard, honnête, actif et capable, mena ses ateliers de telle façon, que jamais M. Féréor n’y trouva rien à blâmer, rien à changer, rien à perfectionner. Tout y marchait avec une entente, un ordre, une économie merveilleuse.

M. Féréor, généreux une fois dans sa longue vie, porta en quelques années les appointements