Page:Segur - Lettres de la comtesse de Segur.djvu/158

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et, de fil en aiguille, la mère embrasse sa fille, toutes deux pleurent; Z… pleure sur sa sœur, la mère saisit les deux cous de ses deux filles, les embrasse avec effusion, les serre contre son sein redevenu maternel, leur dit qu’elle les aime, qu’elle les adore, qu’elle leur sacrifie sa vie et sa fortune, qu’elle fera des choses inattendues qui prouveront sa tendresse, qu’elle les aime tous également, qu’elle a un mauvais caractère, mais un bon cœur. Y…, enchantée, pleure et rit, embrasse sa mère et sa sœur, et le combat finit faute de combattans ; accord parfait, entente cordiale. La paix étant faite, je crois que tu feras bien de lui écrire ; ce sera la première récompense de son retour, le veau gras de l’enfant prodigue[1].

Gaston est un peu souffrant de fatigue et surtout de la journée d’hier mercredi; c’était son jour de réception, une foule telle que deux dames se sont battues, mais battues au point que Méthol allait chercher un sergent de ville pour les séparer, lorsque les autres visiteurs se sont jetés sur elles et les ont tirées aux deux coins opposés de la salle à manger. Par-dessus cette brillante réception, Gaston dînait chez un ménage dont il dirige les enfants ; le ménage est incrédule, mais ébranlé; un dîner de famille était arrangé pour hâter la conversion demi-commencée. Ce dîner se trouve être un gala de quatorze couverts occupés par dix à douze nullités ;

  1. C’était une vieille amie de la famille, qui m’avait prise en amitié. Elle avait bon cœur, mais son humeur inquiète amenait parfois dans son intérieur des brouilles bientôt suivies de réconciliations, de cadeaux et de tendresses.