Page:Segur - Pauvre Blaise.djvu/70

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

près de la pauvre femme sans pouvoir calmer son désespoir. Elle la quitta enfin, la laissant aux mains des voisines, dont les consolations furent plus rudes, mais plus efficaces.

« Voyons, ma bonne Marie, lui dit l’une, vous n’êtes pas raisonnable ; puisque le bon Dieu le veut, vous ne pouvez l’empêcher.

— À quoi vous sert de vous désoler ainsi, dit l’autre ; ce ne sont pas vos cris ni vos pleurs qui feront revivre l’enfant.

— Soyez raisonnable, dit la troisième, et voyez donc qu’il vous reste encore quatre enfants ; il y en a tant qui n’en ont pas.

— Et le pauvre innocent qui, en se réveillant, aura besoin de votre lait ; quelle nourriture vous lui donnerez en vous chagrinant comme vous le faites !

— On fera de son mieux pour vous soulager, ma pauvre Marie ; tenez, voyez Mme  Désiré qui prend votre enfant et qui va le nourrir avec le sien. »

En effet, Mme  Désiré Thorel, bonne et gentille jeune femme qui demeurait tout près, et qui avait un enfant au maillot, était accourue à la première nouvelle du malheur arrivé à Marie. Elle avait aidé avec bonté et intelligence Mme  Renou dans les soins donnés à l’enfant noyé ; au réveil du petit, qu’Hélène avait endormi, elle le prit, l’enveloppa de langes et l’emporta chez elle pour le nourrir et