Page:Senancour - Rêveries, 1833.djvu/121

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attristée, aux rayons de cette suave lumière. Sur notre globe, dans la zone équatoriale, les feux de l’air sont presque suffisans pour entretenir la vie ; tandis qu’une vague inquiétude porte les tribus des pays sombres à chercher, quand elles le peuvent, des lieux moins oubliés du soleil. Parmi nous, lorsqu’il s’élève à l’horizon, il ramène la confiance, le goût du travail, le courage de vivre et d’attendre ; mais quand le jour finit, une sorte de langueur, une secrète lassitude nous apprend que nous n’allons plus être immédiatement soutenus par sa force toujours renaissante. Des Arabes peuvent veiller près de leurs tentes, à la lueur des astres de la nuit ; mais pour les habitans d’une contrée nébuleuse, les momens d’activité finissent lorsque s’arrête l’influence du soleil. Qu’ils agissent durant le jour, et qu’ensuite ils reposent ; ils connaîtront peu l’ennui. En vain une société, infatuée de quelques amusemens bizarres, intervertira cet ordre ; il sera constamment senti par plusieurs hommes dont l’organisation heureusement flexible, mais forte, se montre rebelle à tout joug. C’est ainsi qu’à divers égards la vie indépendante, qui seule est vraiment naturelle, convient seule aux esprits étendus.

Tout semblait nous prescrire de borner nos vœux, afin d’être contens, et de cacher nos jours, afin de