Page:Senancour - Rêveries, 1833.djvu/82

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nation de l’homme, et il semble qu’elle ne laisse plus d’incertitude, lorsque sous le soleil, à la vue de l’espace, le parfum des premières fleurs de l’année nous porte à nous interroger nous-mêmes.

L’aspect de la nature est une révélation continuelle, mais souvent obscure, de nos besoins, de nos devoirs, de notre avenir : la pensée impuissante de l’homme appartient à la grande pensée de l’univers. Quelquefois l’expression, dans son étendue, est trop imposante pour notre faiblesse ; mais du moins nous serons sensibles à l’harmonie de quelques accidens de lumière, et de plusieurs convenances végétales. Celui qui n’en sait pas jouir ignore beaucoup d’autres choses, et méconnaît en grande partie le charme des relations humaines les plus intimes.

Parmi les fleurs qui, dans les jours d’entraînement, après l’enfance, pourraient en partie déterminer le caractère, quelques-unes inspirent le goût des loisirs de la campagne, et nulle d’entre elles ne fait plus d’impression que la violette, au pied d’un groupe d’arbustes, devant les premiers rayons du printemps. Peu visible, mais curieuse à découvrir, elle a pour partage de s’annoncer en secret, comme étant elle-même un premier don du printemps de la vie, un premier sourire du bonheur possible. C’est une émanation sans effort, et que dérangerait le