Page:Servières - Tannhæuser à l’Opéra en 1861, 1895.djvu/126

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théories novatrices qu’elle expose, souleva l’indignation des dilettanti du Théâtre-Italien. La presse musicale, qui se composait alors moins qu’aujourd’hui d’esprits éclairés et de juges compétents, extermina Tannhæuser, comme si cette œuvre était directement issue de tendances regardées comme subversives[1].

D’ailleurs, qui, à cette époque, en dehors de Baudelaire, de Frédéric Villot et de deux ou trois autres[2], s’était donné la peine de la lire, cette Lettre sur la musique et de comprendre les théories d’art qu’elle expose ? Aussi bien, comme l’exemple n’était pas produit à côté de la théorie, puisque ni Tristan, ni le Rheingold, ni la Walküre n’étaient encore connus, les lecteurs français furent excusables de ne pas mieux apprécier cet abrégé de plusieurs ou-

  1. L’auteur de la Lettre à F. Villot avait bien mis en garde le lecteur contre cette confusion par cet avertissement : « Considérer les éclaircissements que je vous adresse comme une préparation à la représentation de Tannhæuser serait concevoir une attente très erronée à cet égard. » Mais on n’en avait tenu aucun compte.
  2. Parmi ceux-là, il faut nommer, outre Lapommeraye, le critique musical de la Causerie, Léon Perroud, qui, le 24 mars, analysa clairement et avec bienveillance la Lettre sur la musique. En terminant, il appelait Wagner « un semeur d’idées ».