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l’exécution, tant les voix sont bien ménagées, tant l’instrumentation est sonore sans être rebelle aux interprètes ».

Par ce qu’écrivaient des critiques munis de quelques connaissances musicales, tels que G. Héquet, Scudo, Fiorentino, Azevedo, Jouvin, on peut supposer à quel degré d’inintelligence et de parti pris hostile en vint la tribu des feuilletonnistes chargés de la critique dramatique à tout faire.

Voici, par exemple, l’opinion de Paul de Saint-Victor[1].

Suivant le lundiste de la Presse,


L’ouverture et la marche du deuxième acte exceptées, la partition n’est qu’un chaos musical… Tantôt, c’est une obscurité compacte et pesante, — ce que M. Wagner appelle la mélodie infinie, sans doute, — qui écrase la plus robuste attention ; tantôt, c’est un vacarme discordant qui ne parvient qu’à dissimuler les plus grossiers fracas des tempêtes physiques.

L’ouverture du Tannhæuser a deux parties bien tranchées : l’une est très belle, c’est l’hymne religieux qui la termine, l’autre est un charivari suraigu, les violons semblent pris du delirium tremens… Le chant des pèlerins descendant la colline est du plain-chant affadi, une vague jérémiade

  1. Presse du 18 mars 1861. L’ignorance de Paul de Saint-Victor en musique était telle qu’il découvrait que le ténor Niemann avait une voix bien modulée.