Page:Shaftesbury - Principes de la philosophie morale, tad Diderot, 1745.djvu/35

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informons encore de ſon caractère. « M. ***** a de la Religion, dites-vous,  » mais « a-t’il de la probité : »[1] Si vous m’euſſiez fait entendre d’abord qu’il étoit honnête-homme, je ne me ſerais jamais avisé de demander, s’il étoit

  1. Remarquez qu’il eſt question ici de la Religion en géneral. Si le Chriſtianiſme étoit un culte univerſellement embraſſé, quand on aſſureroit d’un homme qu’il est bon Chrétien, peut-être ſeroit-il abſurde de demander, s’il eſt honnête-homme ; parce qu’il n’y a point, dira-t’on, de Chriſtianiſme réel ſans probité. Mais il y a preſqu’autant de cultes différens que de Gouvernemens ; & ſi nous en croyons les Hiſtoires, leurs préceptes croisent ſouvent les principes de la morale : ce qui ſuffit, pour juſtifier ma penſée. Mais afin de lui donner toute l’évidence poſſible, ſuppoſez que, dans un beſoin preſſant de ſecours, on vous adreſſât à quelque Juif opulent : vous ſçavez que ſa Religion permet l’uſure avec l’Etranger ; eſpéreriez-vous donc traiter à des conditions plus favorables, parce qu’on vous aſſureroit que cet homme est un des Sectateurs les plus zélés de la Loi de Moyſe ? & tout bien conſidéré, ne vaudroit-il pas beaucoup mieux pour vos intérêts qu’il paſſât pour un fort mauvais Juif & qu’il fût même ſoupçonné dans la Sinagogue d’être un peu Chrétien ?