Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Guizot, Didier, 1862, tome 5.djvu/465

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Périclès : Pas trop.

Premier Pêcheur : Je vais vous le dire : cette ville s’appelle Pentapolis, et notre roi est le bon Simonide.

Périclès : Le bon roi Simonide, avez-vous dit ?

Premier Pêcheur : Oui, et il mérite ce nom par son règne paisible et son bon gouvernement.

Périclès : C’est un heureux roi, puisque son gouvernement lui mérite le titre de bon. Sa cour est-elle loin de ce rivage ?

Premier Pêcheur : Oui-dà, monsieur, à une demi-journée ; je vous dirai qu’il a une belle fille ; c’est demain le jour de sa naissance, et il est venu des princes et des chevaliers de toutes les parties du monde, afin de jouter dans un tournois pour l’amour d’elle.

Périclès : Si ma fortune égalait mes désirs, je voudrais me mettre du nombre.

Premier Pêcheur : Monsieur, il faut que les choses soient comme elles peuvent être. Ce qu’un homme ne peut obtenir, il peut légitimement le faire pour… l’âme de sa femme.

(Les deux pêcheurs rentrent en tirant leur filet.)

Second Pêcheur : À l’aide, maître, à l’aide, voici un poisson qui se débat dans le filet comme le bon droit dans un procès. Il y aura de la peine à le tirer. Ah ! au diable ! -Le voici enfin, et il s’est changé en armure rouillée.

Périclès : Une armure ! mes amis, laissez-moi la voir, je vous prie. Je te remercie, fortune, après toutes mes traverses, de me rendre quelque chose pour me rétablir ; je te remercie quoique cette armure m’appartienne et fasse partie de mon héritage ; ce gage me fut donné par mon père avec cette stricte recommandation répétée à son lit de mort : Regarde cette armure, Périclès, elle m’a servi de bouclier contre la mort (il me montrait ce brassard) ; conserve-la parce qu’elle m’a sauvé ; dans un danger pareil, ce dont les dieux te préservent, elle peut te défendre aussi. Je l’ai conservée avec amour jusqu’au moment où les vagues cruelles, qui n’épargnent aucun mortel, me l’arrachèrent dans leur rage ; devenues plus calmes, elles