Aller au contenu

Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1866, tome 3.djvu/209

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
205
SCÈNE II.

HUBERT.

— Écoutez-nous, grands rois ; daignez patienter un moment, — et je vous montrerai la paix, l’alliance la plus attrayante. — Gagnez cette cité sans coup ni blessure : — laissez mourir dans leurs lits tous ces vivants, — qui sont venus ici, essoufflés, se sacrifier sur le champ de bataille. — Ne vous obstinez pas, mais écoutez-moi, puissants rois !

LE ROI JEAN.

— Parlez à loisir : nous sommes prêts à écouter.

HUBERT.

— Cette fille d’Espagne que voilà (30), madame Blanche, — est parente du roi d’Angleterre. Comptez les années — du dauphin Louis et de cette aimable vierge. — Si l’amour n’est qu’un désir en quête de beauté, — où la trouvera-t-il plus éclatante que chez Blanche ? — Si l’amour est une passion vouée à la recherche de la vertu, — où la trouvera-t-il plus pure que chez Blanche ? — Si l’amour est une ambitieuse aspiration à une haute alliance, — qui donc a dans les veines un plus noble sang que madame Blanche ? — Ainsi qu’elle, le jeune Louis est complet en toute choses, — beauté, vertu, naissance ; — ou s’il ne l’est pas, la raison, c’est que lui et elle font deux ; — et, quant à elle, s’il lui manque quelque chose, — ce qui lui manque, c’est de ne faire qu’un avec lui. — Il est la moitié de l’homme idéal — qui doit être achevé par elle ; — elle est la perfection partagée — dont il est le complément suprême. — Oh ! comme ces deux sources argentines, quand elles se joindront, — glorifieront leurs rives ! — Vous, rois, vous serez les deux côtés unis par ces deux courants. — Oui, mariez ces deux princes, — et vous serez la double digue qui les protégera. — Cette union aura plus d’effet que vos batteries — sur nos portes closes :