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SCÈNE XVIII.
donnez donc à la mienne le bénéfice de l’âge, — et que mes chagrins se tordent à la place d’honneur !
Elle s’asseoit à côté d’elles.

— Si le désespoir peut admettre une société, — comptez vos douleurs en supputant les miennes. — J’avais un Édouard : un Richard l’a tué ! — J’avais un mari : un Richard l’a tué !

À la reine Élisabeth.

— Tu avais un Édouard : un Richard l’a tué. — Tu avais un Richard : un Richard l’a tué !

LA DUCHESSE D’YORK, à Marguerite.

— J’avais un Richard aussi, et c’est toi qui l’as tué ; — j’avais un Rutland aussi, et tu as aidé à le tuer !

LA REINE MARGUERITE, à la duchesse.

— Tu avais un Clarence aussi, et Richard l’a tué ! — Du chenil de ta matrice s’est évadé — le limier d’enfer qui nous chasse tous à mort, — le dogue qui avait ses dents avant ses yeux, — pour déchirer les agneaux et sucer leur sang pur. — Ce destructeur hideux de l’œuvre de Dieu, — qui règne sur les yeux rougis des créatures en larmes, — le grand tyran par excellence de la terre, — c’est ta matrice qui l’a lâché pour nous traquer jusqu’à nos tombes ! — Ô Dieu juste, équitable et vrai dispensateur, — combien je te remercie de ce que ce chien carnassier — dévore ce qui est sorti du corps de sa mère, — et la jette à côté des autres sur le banc de la douleur !

LA DUCHESSE D’YORK.

— Ô femme de Henry ! ne triomphe point de mes maux : — Dieu m’est témoin que j’ai pleuré sur les tiens !

LA REINE MARGUERITE.

— Laisse-moi dire. J’ai faim de la vengeance, — et je me rassasie de la contempler. — Ton Édouard est mort, celui qui avait tué mon Édouard ; — ton autre Édouard est mort aussi en paiement de mon Édouard. — Le jeune