Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1873, tome 12.djvu/279

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york.

— Ô Dieu ! ce Somerset qui, dominé par son orgueil, — retient mes cornettes, que n’est-il à la place de Talbot ! — Nous sauverions ainsi un vaillant gentilhomme, — en perdant un traître et un couard. — Je pleure de rage et de fureur, — en voyant que nous périssons ainsi, tandis que des traîtres s’endorment dans l’indolence.

lucy.

— Oh ! envoyez du secours à ce seigneur en détresse !

york.

— Il meurt, nous perdons tout ; je manque à ma parole de guerrier ; — nous pleurons, la France sourit ; nous succombons, ils triomphent, ils triomphent toujours ; — et tout cela par la faute de l’infâme traître Somerset !

lucy.

— Que Dieu donc étende sa merci sur l’âme du brave Talbot, — et sur son jeune fils John, qu’il y a deux heures — j’ai rencontré allant rejoindre son martial père ! — Depuis sept ans Talbot n’a pas vu son fils, — et ils ne se rencontrent aujourd’hui que pour mourir tous deux.

york.

— Hélas ! quelle joie aura le brave Talbot — à souhaiter à son fils la bienvenue dans la tombe ? — Assez !… Je suis presque suffoqué de douleur, — en songeant à ces amis si longtemps séparés qui se saluent à l’heure de la mort ! — Lucy, adieu. Tout ce que la fortune me permet, — c’est de maudire la cause qui m’empêche d’aider cet homme. — Le Maine, Blois, Poitiers et Tours sont perdus pour nous — par la faute de Somerset et de son retard.

Il sort.
lucy.

— Ainsi, tandis que le vautour de la discorde — ronge le cœur de nos premiers généraux, — une inerte négligence livre à l’ennemi — les conquêtes de ce conquérant