Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Montégut, Hachette, 1867, tome 3.djvu/403

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Messire Tobie. — Tu es dans le vrai. — Allez frotter votre chaîne d’intendant avec de la mie de pain, Monsieur. Maria, une cruche de vin !

Malvolio. — Mademoiselle Maria, si vous faites quelque cas de la faveur de Madame, vous ne leur fournirez pas les moyens de se conduire malhonnêtement comme ils font ; Madame le saura, je le jure. (Il sort.)

Maria. — Allez vous secouer les oreilles.

Messire André. — Vrai, une aussi belle action que celle de boire quand on a faim, serait de le provoquer en duel et puis de lui manquer de promesse et de se moquer de lui.

Messire Tobie. — Fais cela, chevalier ; je t’écrirai un cartel, ou bien je lui exprimerai de vive voix ton indignation.

Maria. — Bon Messire Tobie, soyez patient pour ce soir ; depuis l’entrevue que ce jeune homme du duc a eue aujourd’hui avec Madame, elle est tout à fait troublée. Quant à Monsieur Malvolio, laissez-moi faire avec lui ; si je ne le dupe pas à le faire passer en proverbe et à le rendre l’objet de l’amusement général, dites que je n’ai pas assez d’esprit pour aller de ce pas tout droit dans mon lit : je sais que je puis faire ce que je dis.

Messire Tobie. — Informe-nous, informe-nous comment ! Dis-nous quelque chose sur son compte.

Maria. — Parbleu, Monsieur, il est quelquefois une manière de puritain.

Messire André. — Oh ! si je croyais cela, je le battrais comme un chien.

Messire Tobie. — Pourquoi cela, parce qu’il est un puritain ? tes précieuses raisons, mon cher chevalier ?

Messire André. — Mes raisons pour faire cela ne sont pas précieuses, mais elles sont cependant assez bonnes.

Maria. — Du diable, si ce puritain l’est toujours, ou s’il est constamment n’importe quoi ; cest un serviteur des circonstances. C’est un âne prétentieux qui sait par cœur les affaires de l’État et qui vous les récite par grandes phrases ; il a si bonne opinion de lui-même et il se croit tellement farci de perfections que son Credo est qu’on ne