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Le Conte de l’Archer.

conduisant avec cette galanterie, mais aussi le courroux de dame Mathurine, sa mère, qui ne manquait pas de le fesser en conscience quand il lui rapportait, comme tout exprès pour l’y inviter, son haut-de-chausse ouvert par quelque large déchirure. Après quoi, elle réparait l’étoffe du bout de ses doigts agiles. Car c’était une personne entendue en ménage que la femme du tanneur Guillaume Bignolet. Il advint même, un jour, qu’en opérant cette restauration de la culotte de son fils, elle y enferma dans la doublure un hanneton vivant qui s’y était glissé pendant l’escalade des lilas. Le pauvre Tristan fut torturé, deux jours pleins, par cette imprudente bête qui le chatouillait terriblement avec ses pattes aux extrémités velues. Et comme par bonté d’âme il se refusait à l’écraser, il renonça à s’asseoir durant tout ce temps-là, attendant que l’animal fût trépassé de sa belle mort, comme disent les nigauds. Car, de vous à moi, il n’est pas de mort qui soit belle.

C’était, au moins, l’avis de frère Étienne Le Barbu, un docte moine qui fréquentait chez le tanneur et son ami Clignebourde, ne souffrant pas qu’on mangeât chez l’un ou chez l’autre quelque volaille dodue ou quelque savoureuse carpe sans qu’il en vînt prendre sa part, non