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Chroniques du Temps passé.

sans la mouiller de quelque vin généreux tiré à quelque tonneau de choix. Car c’était, je vous jure, un bon vivant que ce frère Étienne, au moins pour ce qui est de la chère lie. Car pour ce qui est des autres joies de la vie, et non des moindres, il ne semblait en avoir plus souci qu’un âne bridé d’un bouquet de roses. Aussi le tanneur Bignolet avait-il coutume de dire :

— Ce que j’aime particulièrement dans cet homme de Dieu, c’est qu’on le peut recevoir dans les honnêtes familles, sans y craindre pour la sécurité des poules et poulettes. Il aime trop bien manger pour penser à mal.

— L’un n’empêche l’autre, ne manquait de répondre le sceptique Clignebourde uniquement par esprit de contradiction. Car lui aussi croyait, au fond, à la haute vertu du frocard.

Et tous deux ne manquaient de le consulter sur toutes les choses de la vie, outre que le tanneur l’avait chargé d’instruire son fils Tristan dans ce qu’il faut de belles-lettres pour ne point paraître un sot dans la société des hommes d’armes, ce qui, j’imagine, ne doit pas être beaucoup.

Il fallait entendre converser nos trois compères, après boire, sur l’avenir des enfants, tandis que