Page:Sima qian chavannes memoires historiques v2.djvu/247

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parfait et se tournèrent vers son influence. S’il en fut ainsi, quelle en est la cause ? La voici : dans les temps modernes et dans l’antiquité, il n’y avait plus de rois depuis longtemps ; la maison des Tcheou s’était affaiblie ; quand les cinq hégémons eurent cessé d’être, ses ordres n’eurent plus d’autorité dans l’empire ; c’est pourquoi les seigneurs gouvernèrent par la violence ; les forts tyrannisèrent les faibles ; la majorité opprima la minorité ; les armes et les cuirasses ne furent point déposées ; les hommes de valeur et le peuple furent épuisés. Or, quand Ts’in se tourna du côté du sud et régna sur l’empire, il y eut dès lors en haut un Fils du Ciel ; aussitôt la multitude innombrable du peuple espéra obtenir la paix conforme à sa nature et à sa destinée ; il n’y eut personne qui ne se portât vers lui de tout son cœur et qui ne regardât en haut avec respect. Dans ces circonstances, c’était là que se trouvait le principe du prestige protecteur, de la gloire assurée, du péril conjuré.

Le roi de Ts’in nourrissait des sentiments avides et bas ; il appliquait les connaissances qui sortaient de son propre esprit ; il ne donnait pas sa confiance aux ministres éprouvés et ne contractait pas des liens étroits avec les gens de valeur et le peuple ; il abandonna la ligne de conduite suivie par les rois et établit son pouvoir autocratique ; il interdit les écrits et les livres et rendit impitoyables les châtiments et les lois ; il mit au premier rang la tromperie et la violence, et au dernier rang la bonté et la justice ; il fit de la tyrannie le fondement de l’empire. Or, si celui qui conquiert et annexe met en avant la tromperie et la violence, d’autre part, celui qui pacifie et affermit tient en estime la douceur et l’équité ; cela signifie que les méthodes ne sont pas les mêmes pour prendre et pour conserver.