Page:Sima qian chavannes memoires historiques v3.djvu/258

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inquiet ; c’est que le peuple est chagrin. Lorsque (la note) tche est troublée, alors (le son) est douloureux ; c’est que les affaires sont pénibles. Lorsque (la note) yu est troublée, alors (le son) est anxieux ; c’est que les fortunes sont épuisées. Lorsque les cinq (notes) sont toutes troublées, les rangs empiètent les uns sur les autres et c’est ce qu’on appelle l’insolence ; quand il en est ainsi, la perte du royaume arrivera en moins d’un jour[1].

Les notes musicales de Tcheng et de Wei sont les notes d’une époque troublée[2] ; c’est déjà presque l’insolence[3]. Les notes (qu’on a entendues) parmi les mûriers sur le bord de (la rivière) Pou sont les notes d’un royaume tombé en ruines[4]. Le gouvernement est alors relâché ; le peuple est sans règle ; il parle mal de ses supérieurs ; il agit avec égoïsme, et on ne peut mettre fin à cela.

Toute note musicale prend naissance dans le cœur de l’homme ; la musique est en rapport avec les classes et les attributions. Ainsi, ceux qui connaissent les sons, mais ne connaissent pas les notes, ce sont les animaux ; ceux qui connaissent les notes, mais ne connaissent pas

  1. L’expression [] signifie, dit Kong Yn-ta, que l’événement arrivera dans l’espace de temps qui sépare le matin du soir et sans qu’il se soit écoulé un jour entier.
  2. On sait que Confucius condamnait la musique du pays de Tcheng comme licencieuse ; cf. Luen yu, chap. XV, § 10, et Mencius, VII, a, 37.
  3. Les royaumes de Tcheng et de Wei n’étaient pas entièrement perdus ; ils n’étaient donc pas encore réduits à cette condition dont la caractéristique est l’insolence, comme il a été dit au paragraphe précédent ; mais ils étaient près de cette condition.
  4. La musique qu’on entendait sur le bord de la rivière Pou était celle de Tcheou, dernier souverain de la dynastie Yn. La légende relative à cette musique se trouve rapportée à la fin de ce chapitre des Mémoires historiques.