Page:Sima qian chavannes memoires historiques v3.djvu/316

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pourquoi ils n’entretinrent point de telles pensées[1] ; moi, comment dirai-je spontanément que j’en suis capable ?

« Maintenant les Hiong-nou font des incursions dans l’empire ; mes armées et mes officiers n’ont pas remporté de succès ; parmi le peuple de la frontière, jeunes et vieux[2] souffrent de la guerre depuis de longs jours. C’est là ce qui émeut incessamment mon cœur et ce qui m’afflige ; il n’est pas de jour où je l’oublie.

« Maintenant, puisque je n’ai point encore pu dissiper et repousser (ce fléau), je désire du moins fortifier la frontière et y établir une garde, nouer des relations d’amitié (avec les Hiong-nou) et avoir (avec eux) des échanges d’ambassadeurs. Assurer le repos et la tranquillité à la Marche du nord, c’est ce que je considérerai comme une grande gloire. D’ailleurs qu’on ne délibère plus sur les affaires militaires.

Ainsi les cent familles n’eurent à souffrir de corvées ni au dedans, ni au dehors ; elles purent décharger leurs épaules[3] dans leurs champs ; l’empire fut puissant et prospère ; le grain en vint à valoir une dizaine de pièces de monnaie[4]. Sur un espace

  1. La pensée d’imposer de nouveau la suprématie chinoise aux princes de Nan-yue et de Tch’ao-sien.
  2. Littéralement : pères et fils.
  3. L’expression désigne l’action d’un homme qui se soulage d’un fardeau pesant, qui en « décharge son épaule », Cf. Tso tchoan, 2e année du duc Siang : « il lui proposa de se décharger de son fardeau sur Tsin. Une phrase toute semblable se retrouve dans le Tso tchoan, 6e année du duc Ting. Cf. encore Ts’ien Han chou, chap. I b, 2e année tchong yuen de Koang-ou ti : « d’ailleurs il savait que l’empire était épuisé et ruiné, songeait à se réjouir et déchargeait son épaule.
  4. Il est fâcheux que Se-ma Ts’ien n’indique pas ici quelle est la mesure de riz qui atteignit ce très bas prix. Sur la valeur qu’eut parfois le riz, cf. tome II, p. 16.