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LA CORVÉE

français, on conserve les belles traditions du Québec et tout ce qui fait la force du caractère national.

Depuis trois semaines, Pierre effardoche sa pièce de souches ; il a déserté vers l’ouest, une large bande en taillis, afin de donner dû soleil à la terre-neuve où, bientôt, l’arôme des sarrasins s’élèvera pour embaumer les alentours. Les souches débarrassées des broussailles se dressent les unes contre les autres, et, du clos voisin, le cultivateur les contemplent, calculant les milliers de bardeaux qu’il en tirera pour l’allonge qu’il se propose de faire à ses bâtiments dès l’automne venu ; les débris de racines avant d’aller pétiller dans le gros poêle à deux ponts, feront la plus solide clôture d’embarras qui n’ait jamais été.

Le soleil vient de se lever radieux, illuminant les coteaux et les bois, faisant monter de la terre humide de rosée, une buée chaude où danse la poussière fine des chemins. Les blés dressent leurs petites tiges vertes oscillant mollement à la moindre brise. Dans la lumière crue du matin, la route se déroule en un cordon d’argent ; au sud, par le milieu de la plaine ensoleillée qui dévale, l’église de Laflèche émerge d’une mer de feuillage aux teintes douces, et, tout à l’entour, les maisons piquées de toits blancs semblent, dans l’éloigne-