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sur le rétablissement des tours

sa situation sous un aspect qui lui rend le courage, la moralise et la met en garde contre l’inconduite.

J’ai eu bien des occasions de constater que la fille-mère qui élève son enfant, retombe rarement dans sa première faute ; tandis que celle qui est condamnée, par les nécessités de sa profession, à mettre son enfant en nourrice, ou, qui s’en voit séparée par la mort, tarde rarement à succomber de nouveau. J’ajouterai que telle fille-mère qui aurait volontiers, au moment de ses couches, profité de la possibilité de se débarrasser de son enfant, ne voudrait plus, pour rien au monde, l’éloigner lorsque, à l’aide de l’assistance, elle l’a nourri pendant quelque temps, d’où il résulte un avantage moral pour la mère et pécuniaire pour le département.

Le régime actuel, malgré ses imperfections, est incomparablement préférable à celui du tour. On ne croirait pas, si l’expérience ne nous l’enseignait, de combien de malheurs le tour a été l’occasion.

Telle mère n’aurait pas demandé mieux que de garder son enfant ; mais, le regret dans le cœur, elle s’est décidée, par des conseils, à l’envoyer au tour.

Personne n’ignore les soins minutieux dont l’enfant doit être l’objet aussitôt qu’il est né ; or, un laps de temps, plus ou moins considérable, s’écoule entre l’instant de la naissance et celui du dépôt. L’enfant destiné au tour, est, d’ordinaire, privé complètement de ces premiers soins ; quelle que soit la saison, peu de précautions sont prises pour le transporter ; le pauvre petit est une chose à jeter au rebut, sans s’inquiéter de sa conservation !… Combien n’a-t-on pas vu de femmes ou filles, retrouvant en elles, après leur rétablissement, toute l’ardeur de l’amour maternel, venir réclamer celui dont elles s’étaient séparées dans un moment de prostration. Démarche tardive, souvent inutile ! — En entrant à l’hospice, l’enfant, né dans de bonnes conditions de vitalité, était déjà mortellement atteint, ou, tout au moins, portait désormais le germe d’infirmités graves et incurables.

IIe série, 1879.
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