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II


Résumons brièvement ce qu’on savait sur l’Inde avant le commencement du XIXe siècle ; assurément c’était peu de chose. Cette contrée, si voisine du berceau de l’homme primitif, fut vraisemblablement conquise sur des tribus sauvages par la race supérieure des Aryens, qu’on suppose avoir occupé tout l’espace compris entre le Tibet, la mer Caspienne, le Caucase, le Taurus et l’Ararat. Sa civilisation précoce a dû exercer sur la Chine, la Perse, l’Assyrie, peut-être sur l’Égypte et la Grèce, une influence considérable. Mais, dans l’état actuel de nos connaissances, il est impossible de retracer en détail et avec quelque certitude cette histoire plus d’une fois ébauchée. D’un point à l’autre pourtant les ressemblances d’idées sont frappantes : religions et sociétés, arts et lettres, mœurs et lois, tout indique une origine commune. Les rapports de commerce entre ces différents pays ne sauraient avoir manqué ; les relations politiques furent assez rares.

C’est les armes à la main que les conquérants des trois mondes alors connus tentèrent de surprendre cette mystérieuse nation de l’Inde dans ses forteresses presque inexpugnables de l’Asie centrale ; Sémiramis, Sésostris, Cyrus, Darius s’approchèrent peu à peu de ces limites sacrées. Avant eux, le divin Bacchus, osant les franchir en compagnie d’une troupe de Satyres et de Ménades, avait été, pour ainsi dire, dans la mythologie des Hellènes, le poétique symbole de ces expéditions aventureuses, où la réalité touchait de si près à la fable. Il faut voir dans les Dionysiaques de Nonnus de Panopolis ce demi-dieu, éblouissant de beauté et de jeunesse, le front couronné de grappes de raisin, armé d’un thyrse fleuri comme d’une baguette magique, transformant en vin l’eau des plus vastes fleuves, enivrant ses ennemis pour les vaincre plus aisément, luttant contre des géants, des éléphants, des