Page:Soupé - Études sur la littérature sanscrite.djvu/83

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cablé de faim et de fatigue, l’hospitalité la plus empressée, elle lui demanda pour récompense cent fils, pareils à son époux ; il les lui promit ; mais elle attendit deux ans avant que ce désir fût exaucé. Alors, égarée par l’impatience et sans en prévenir son mari, elle s’ouvrit le sein, et il en sortit une masse de chair fort dure. Comme elle se plaignait de cet accident, Vyâsa, dont la promesse ne pouvait avoir été vaine, fit creuser et remplir de beurre clarifié une centaine de trous, semblables à ceux où l’on dépose le feu sacré. Dans chacun d’eux, il mit un petit fragment de la masse de chair, et il partit pour la montagne, afin de s’y adonner à ses austérités ordinaires, en ordonnant de surveiller avec soin tous ces trous et de les rouvrir au moment convenable. C’est de cette façon que naquirent Douryôdhana, ses quatre-vingt-dix-neuf frères, et d’un cent unième fragment, recueilli par hasard, une fille, Douhsala, qui fut mariée plus tard à un prince des Sîndhavas.

Les aventures conjugales de Pândou ne furent pas moins bizarres ; il prit deux femmes : l’une était Kountî, qui descendait de la branche de Yadou, établie à Mathoura, et qui, antérieurement, mère sans cesser d’être vierge, avait eu un enfant, nommé Karna, du divin Aditya (le Soleil) ; l’autre était Madri, fille du roi de Madra au nord-ouest de l’Hindoustan. Une fois, à la chasse, Pândou tua par mégarde, selon les uns un brâhmane, suivant les autres deux gazelles qui s’accouplaient ; en tout cas, il fut maudit et condamné à l’impuissance. Désespéré, il se retira au fond des bois de l’Himalaya avec ses deux épouses ; mais des miracles vinrent à son aide. Kountî obtint du Soleil, son ancien amant, des formules d’incantation, par lesquelles elle pouvait à volonté faire descendre tel ou tel dieu du ciel et s’unir à lui. Trois fois elle renouvela cette singulière épreuve, et c’est ainsi qu’elle engendra : de Yama, dieu de la justice, l’honnête Youdhichthira ; d’Indra, le dieu des airs, le brave Ardjouna ; et de Vâyou, le dieu du vent, l’impétueux Bhîmaséna, surnommé Vrikodara