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l’apprenti.

bien près de le voler ! Reste auprès de Frédéric ; c’est ton compagnon naturel ; écoute les avis qu’il te donnera, ne te blesse point de sa supériorité ; lui-même sait bien que c’est à Dieu qu’il la doit, et il ne t’en fera point souffrir.

Puis, serrant la main de François qui restait immobile dans la sienne :

— Jure-moi, lui dit-elle, que tu ne te sépareras point de ton frère, et que tu n’iras point chercher un toit loin de la seule affection qui te reste.

François ému promit en pleurant, et bien qu’il n’y eût rien de senti dans cette promesse, elle parut contenter la mourante, car sa figure s’illumina d’un rapide rayon de joie.

— Je meurs tranquille, dit-elle. Oh ! mes enfants bien-aimés : n’oubliez point que tout ce que j’ai souffert c’est pour vous deux, et que quand vous vous plaigniez, vos deux voix m’arrivaient au cœur en même temps ; restez donc unis dans cette vie comme vous l’avez été dans mon amour.

Puis, étendant ses mains glacées sur ces deux jeunes fronts qui se courbaient devant elle, elle prononça d’une voix inintelligible quelques mots qui ne s’adressaient qu’à Dieu et ne furent entendus que de lui seul ; ensuite elle rendit le dernier soupir.

Le lendemain, les deux orphelins suivaient la morte au cimetière. Des porteurs, un seul prêtre et ses enfants la conduisaient à sa dernière demeure. Sans les larmes de Frédéric et de son frère, rien n’eût