Page:Stendhal - Chroniques italiennes, I, 1929, éd. Martineau.djvu/109

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deux heures de nuit je passerai en chantant, et peut-être, placée au grand balcon de pierre, vous laisserez tomber une fleur cueillie par vous dans votre jardin. Ce sont peut-être les dernières marques d’affection que vous donnerez au malheureux Jules. »

Trois jours après, le père et le frère d’Hélène étaient allés à cheval à la terre qu’ils possédaient sur le bord de la mer ; ils devaient en partir un peu avant le coucher du soleil, de façon à être de retour chez eux vers les deux heures de nuit. Mais, au moment de se mettre en route, non-seulement leurs deux chevaux, mais tous ceux qui étaient dans la ferme, avaient disparu. Fort étonnés de ce vol audacieux, ils cherchèrent leurs chevaux, qu’on ne retrouva que le lendemain dans la forêt de haute futaie qui borde la mer. Les deux Campireali, père et fils, furent obligés de regagner Albano dans une voiture champêtre tirée par des bœufs.

Ce soir-là, lorsque Jules fut aux genoux d’Hélène, il était presque tout à fait nuit, et la pauvre fille fut bien heureuse de cette obscurité ; elle paraissait pour la première fois devant cet homme qu’elle aimait tendrement, qui le savait fort bien, mais enfin auquel elle n’avait jamais parlé.

Une remarque qu’elle fit lui rendit un