Page:Stendhal - De l’amour, II, 1927, éd. Martineau.djvu/132

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c’est que, quelque bornés que soient les professeurs, les enfants apprennent malgré eux de leurs petits camarades l’art de vivre dans le monde et de ménager les intérêts. Un professeur sensé devrait expliquer aux enfants leurs petites querelles et leurs amitiés, et commencer ainsi son cours de morale plutôt que par l’histoire du Veau d’or[1].

Sans doute, d’ici à quelques années, l’enseignement mutuel sera appliqué à tout ce qui s’apprend ; mais, prenant les choses dans leur état actuel, je voudrais que les jeunes filles étudiassent le latin comme les petits garçons ; le latin est bon parce qu’il apprend à s’ennuyer ; avec le latin, l’histoire, les mathématiques, la connaissance des plantes utiles comme nourriture ou comme remède, ensuite la logique et les sciences morales, etc. La danse, la musique et le dessin doivent se commencer à cinq ans.

  1. Mon cher élève, monsieur votre père a de la tendresse pour vous ; c’est ce qui fait qu’il me donne quarante francs par mois pour que je vous apprenne les mathématiques, le dessin, en un mot à gagner de quoi vivre. Si vous aviez froid faute d’un petit manteau, monsieur votre père souffrirait. Il souffrirait parce qu’il a de la sympathie, etc., etc. Mais, quand vous aurez dix-huit ans, il faudra que vous gagniez vous-même l’argent nécessaire pour acheter ce manteau. Monsieur votre père a, dit-on, vingt-cinq mille livres de rente ; mais vous êtes quatre enfants, donc il faudra vous déshabituer de la voiture dont vous jouissez chez monsieur votre père, etc., etc.