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son salon que, le lendemain, la sentence qui venait d’être rendue depuis une heure contre le petit del Dongo serait présentée à la signature du prince et approuvée par lui. Quelques minutes plus tard la duchesse sut ce propos de son ennemie.

Il faut que le comte soit bien mal servi par ses agents ! se dit-elle ; encore ce matin il croyait que la sentence ne pouvait être rendue avant huit jours. Peut-être ne serait-il pas fâché d’éloigner de Parme mon jeune grand-vicaire ; mais, ajouta-t-elle en chantant, nous le verrons revenir, et un jour il sera notre archevêque. La duchesse sonna :

— Réunissez tous les domestiques dans la salle d’attente, dit-elle à son valet de chambre, même les cuisiniers ; allez prendre chez le commandant de la place le permis nécessaire pour avoir quatre chevaux de poste, et enfin qu’avant une demi-heure ces chevaux soient attelés à mon landau. Toutes les femmes de la maison furent occupées à faire des malles, la duchesse prit à la hâte un habit de voyage, le tout sans rien faire dire au comte ; l’idée de se moquer un peu de lui la transportait de joie.

« Mes amis, dit-elle aux domestiques rassemblés, j’apprends que mon pauvre neveu va être condamné par contumace pour avoir eu l’audace de défendre sa vie contre un furieux ; c’était Giletti qui voulait le tuer. Chacun de vous a pu voir combien le caractère de Fabrice est doux et