Page:Stendhal - Rome, Naples et Florence, III, 1927, éd. Martineau.djvu/182

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dans l’arrière-boutique de son maître, était agité de l’idée que, s’il faisait une grande découverte, il aurait la croix et serait fait comte. Ce ressort, si approprié aux temps modernes, égalait par sa puissance celui qui porta jadis les Romains à l’empire du monde. Sous le gouvernement de Melzi, le royaume d’Italie fut plus heureux que ne l’a jamais été la France. Il marchait franchement à la liberté. Melzi aima tendrement cette source de tout bonheur : mais il avait les défauts de l’éducation ancienne, il manquait de vigueur. Il ne profita pas de l’année de sa vice-présidence pour créer de nouveaux intérêts. Au reste, le pouvait-il ? je le crois, car Buonaparte n’eut jamais de plan fixe : il était alors occupé de la France. Washington lui-même eût été embarrassé sur le degré de liberté politique qu’il convenait de confier à un peuple coupable de tant d’égarements, qui avait si peu profité par l’expérience, et qui au fond du cœur nourrissait encore tous les sots préjugés donnés par une vieille monarchie : c’étaient les Ilotes de cette monarchie qui avaient fait la terreur.

Au reste, aucune des idées qui auraient occupé Washington n’arrêta l’attention du César moderne ; ses vues étaient toutes personnelles et égoïstes. Donner d’abord au peuple français autant de liberté qu’il