Page:Stendhal - Rome, Naples et Florence, III, 1927, éd. Martineau.djvu/55

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On voit pourquoi la froideur académique glace les livres du peuple le plus passionné de l’univers. Ce peuple peut le disputer aux Français pour l’esprit ; et son esprit imprimé serait sifflé même au boulevard. Comparé à l’esprit italien, Scarron est plein de noblesse ; les dialogues de Fénelon sont intraduisibles en toscan : rien de plus aisé que de les mettre en vénitien ou en milanais. La prose poétique de nos grands écrivains du jour, au contraire, est de l’italien tout pur.

Parler de tout ceci à Florence, c’est justement parler de corde dans la maison d’un pendu. Je trouve Florence en arrière de la Lombardie ; d’abord le pretismo, comme on a dit tout le temps de la promenade, tyrannise les petites villes : Prato, Pistoja, Arezzo, Sienne ; et la Lombardie avait été préparée par les suppressions de Joseph II et par le comte de Firmian. On voit déjà Beccaria et Parini très-supérieurs à leurs contemporains de Florence ; en second lieu, Florence, département français, a révolté avec raison les habitants. L’orgueil de la langue fait la moitié des conversations : quoi de plus choquant que des affiches en français !

Florence n’a donc pas pris ce qu’il y avait de libéral dans les mesures de Buona-