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Page:Sue - Arthur, T1, 1845.djvu/83

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rendait le service avec une bienveillance toute parfaite.

En résumé, le sens moral des entretiens que j’avais avec lui, et qui de sa part se composaient de phrases courtes, concises et nerveuses, affirmait : — « que le pivot de tout étant l’or, puisque les plus beaux caractères, une fois aux prises avec le besoin, s’avilissaient quelquefois jusqu’à l’infamie, il fallait rester riche, pour être sur de rester honnête homme ; — que tout dévouement avait son arrière-pensée ; — que tout homme était corruptible, mais que le taux, le moment ou la monnaie de la corruption de chacun variait selon les caractères individuels ; — que toute amitié devant absolument avoir son heure négative, il était inutile de compter sur un sentiment qui, un jour, vous manquerait ; — enfin je devais, selon ces terribles maximes, m’estimer heureux de n’avoir ni frère, ni sœur, et d’être ainsi pur de tout fratricide véniel : l’homme étant fait de la sorte, qu’il ne voit presque toujours dans la fraternité qu’une diminution d’héritage ; car, — ajoutait mon père, — bien peu, parmi les plus purs, peuvent nier avoir pensé au moins une fois dans leur vie, en supputant la fortune qu’ils partageaient : — Si j’étais seul ! »