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Page:Sue - Arthur, T1, 1845.djvu/93

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« Mon enfant… pourquoi me dire à moi de ces vanités ?… Il n’y a rien d’éternel, ni même de durable dans les sentiments humains… la joie, le bonheur, ne le sont pas… la douleur et la tristesse le sont encore moins… Rappelez-vous bien ceci, mon pauvre enfant. Vous êtes généreux et bon… vous m’aimez tendrement… vous êtes à cette heure affreusement navré à la seule pensée de me perdre… Votre douleur actuelle est véritablement si intense qu’elle semble vous voiler l’avenir d’un linceul… et pourtant cet orgasme si pénible ne peut, ne doit pas durer : plus ou moins de temps après ma mort… vous en viendrez à me moins regretter… puis à chercher des distractions, puis à vous consoler… puis à m’oublier !… »

— Jamais, dis-je à mon père, en me jetant au pied de son lit, en inondant sa main de larmes…

Il appuya tendrement sa main déjà froide sur mon front, et continua : — « Pauvre cher enfant !  ! pourquoi nier l’évidence… pourquoi vouloir échapper à l’inexorable loi de notre espèce ? … Il n’y a, voyez-vous, dans ce refroidissement successif des regrets qui se termine par l’oubli, rien d’odieux ni de méchant… Rien de plus naturel, lieu de plus humain… Bien