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Page:Sue - Arthur, T1, 1845.djvu/94

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plus, un jour, en jouissant des biens que je vous aurai laisses, vous n’éprouverez aucune tristesse ; vous penserez, je le veux, çà et là, quelquefois à moi, mais rarement… et sans angoisse… Mon souvenir ne sera jamais compté dans vos joies, dans vos plaisirs, dans vos projets de chaque jour ; enfin je ne paraîtrai pas plus dans votre vie florissante et vivace que la poussière de l’arbre qui a vécu son temps et sert d’engrais à ses rejetons… Rien de plus simple, de plus humain, de plus naturel, je vous le répète. »

— Ah ! ne croyez pas cela, m’écriai-je épouvanté. … ces biens me seront odieux… ma douleur sera inconsolable… Mais mon père ajouta :

— « Encore une promesse folle, mon enfant ; quatre-vingt mille livres de rentes ne sont jamais odieuses, et la plus âpre douleur se console toujours… Ne sais-je pas par moi-même ? n’ai-je pas éprouvé ainsi à la mort de mon père ; n’éprouverez-vous pas ainsi après moi ?… Et si vous avez un fils, n’éprouvera-t-il pas de même après vous ? Croyez-moi, mon enfant, la véritable sagesse consiste, je crois, à pouvoir envisager ainsi la réalité inexorable de l’espèce, et à ne se point abuser de vaines espérances. Une fois là… une fois que le vrai a dissipé les