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Page:Sue - Arthur, T4, 1845.djvu/202

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toujours vive, rieuse et folâtre, toujours pensionnaire, me traitait comme un frère. Dans sa chaste ignorance, elle me mettait souvent à de rudes épreuves : tantôt c’était sa collerette à rattacher, tantôt ses longs cheveux à renouer sous son chapeau, ou quelque lacet de son brodequin à repasser dans son œillet.

Aussi, dans ces excursions lointaines, en contemplant avec adoration la délicieuse figure de Marie, qui, sous sa chevelure couverte d’un givre brillant, ressemblait à une rose épanouie sous la neige, que de fois un aveu me vint aux lèvres !… Mais Marie, croisant ses deux bras sur le mien, s’appuyait sur moi avec tant de confiance, elle me regardait avec tant de candeur et tant de sérénité, que chaque jour je remettais cet aveu au lendemain.

Je craignais qu’un mot hasardé ou prématuré ne vînt détruire ce bonheur calme et pur.

J’attendais patiemment… Je ne m’abusais pas sur le sentiment que j’inspirais à Marie : sans prétention sotte, sans fatuité ridicule, je ne pouvais me refuser à l’évidence. Depuis plus de deux mois je la voyais presque chaque jour ; mes soins pour elle, si jeune, si naïve, si peu habituée aux séductions du monde, l’avaient sensiblement touchée ; mais j’avais aussi