Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 7-8.djvu/32

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profonde jardinière en bois d’ébène, d’où sortait ce treillis), entourait ce canapé d’une sorte de paravent de feuillage, diapré de larges fleurs vertes en dehors, pourpres au dedans, et d’un émail aussi éclatant que ces fleurs de porcelaine que la Saxe nous envoie. Un parfum suave et léger comme un faible mélange de violette et de jasmin s’épandait de la corolle de ces admirables passiflores.

Chose assez étrange, une grande quantité de livres tout neufs (Adrienne les avait achetés depuis deux ou trois jours) et tout fraîchement coupés étaient éparpillés autour d’elle, les uns sur la causeuse, les autres sur un guéridon, ceux-là enfin, au nombre desquels se trouvaient plusieurs grands atlas avec gravures, gisaient sur le somptueux tapis de martre qui s’étendait au pied du divan. Chose plus étrange encore, ces livres, de formats et d’auteurs différents, traitaient tous du même sujet.

La pose d’Adrienne révélait une sorte d’abattement mélancolique ; ses joues étaient pâles ; une légère auréole bleuâtre, cernant ses grands yeux noirs à demi voilés, leur donnait une expression de tristesse profonde.

Bien des motifs causaient cette tristesse, entre autres la disparition de la Mayeux. Sans croire positivement aux perfides insinuations