Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 7-8.djvu/462

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inspirer une confiance entière, mais encore assez éprouvé par mille chagrins pour être capable de vous offrir pitié, appui, conseil !… Dites, ma chère enfant, ajouta mademoiselle de Cardoville en regardant attentivement la Mayeux, si vous étiez accablée par une de ces souffrances dont on rougit, ne seriez-vous pas heureuse, bien heureuse, de trouver une âme sœur de la vôtre, où vous pourriez épancher vos chagrins et les alléger de moitié par une confiance entière et méritée ?

Pour la première fois de sa vie, la Mayeux regarda mademoiselle de Cardoville avec un sentiment de défiance et de tristesse.

Les dernières paroles de la jeune fille lui semblaient significatives.

— Sans doute elle sait mon secret, se disait la Mayeux ; sans doute mon journal est tombé entre ses mains ; elle connaît mon amour pour Agricol, ou elle le soupçonne ; ce qu’elle m’a dit jusqu’ici a eu pour but de provoquer des confidences afin de s’assurer si elle est bien informée.

Ces pensées ne soulevaient dans l’âme de la Mayeux aucun sentiment amer ou ingrat contre sa bienfaitrice, mais le cœur de l’infortunée était d’une si ombrageuse délicatesse, d’une si douloureuse susceptibilité à l’endroit de son