Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 9-10.djvu/335

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avait faite de n’entrer que lorsqu’il appellerait.

L’infirmier, portant son réchaud et ses fers rougis à blanc, était au nombre des nouveaux arrivants ; Gabriel, l’apercevant, lui cria d’une voix altérée :

— Vite, vite ; mon ami, vos fers ;… j’y avais pensé, grâce à Dieu…

L’un des hommes qui venait d’entrer s’était heureusement précautionné d’une couverture de laine ; au moment où le missionnaire parvenait à arracher son bras d’entre les dents de Morok qu’il tenait toujours sous son genou, on jeta la couverture sur la tête de l’hydrophobe qui fut aussitôt enveloppé et garrotté sans danger, malgré sa résistance désespérée.

Gabriel alors se releva, déchira la manche de sa soutane, et mettant à nu son bras gauche, où l’on voyait une profonde morsure, saignante et bleuâtre, il fit signe à l’infirmier d’approcher, saisit un des fers rougis à blanc et, par deux fois, d’une main ferme et sûre, il appliqua l’acier incandescent sur sa plaie avec un calme héroïque qui frappa tous les assistants d’admiration.

Mais, bientôt, tant d’émotions diverses, si intrépidement combattues, eurent une réaction inévitable : le front de Gabriel se perla de grosses gouttes de sueur ; ses longs cheveux blonds se