Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 9-10.djvu/548

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saint parmi les plus saints… était réservée la grâce d’accomplir mon rachat… lui qui a tant fait pour le salut de ses frères.

— Oh ! oui, mon frère, lui qui a tant souffert, lui qui, sans se plaindre, a vidé de si amers calices, a porté de si lourdes croix ; lui qui, ministre du Seigneur, a été l’image du Christ sur la terre, il devait être le dernier instrument de cette rédemption…

— Oui… car je le sens à cette heure, ma sœur, le dernier des miens, touchante victime d’une lente persécution, est sur le point de rendre à Dieu son âme angélique… Ainsi… jusqu’à la fin… j’aurai été fatal à ma race maudite… Seigneur, Seigneur, si votre clémence est grande, votre colère aussi a été grande.

— Courage et espoir, mon frère… songez qu’après l’expiation vient le pardon, après le pardon la récompense… Le Seigneur a frappé en nous et dans votre postérité l’artisan rendu méchant par le malheur et par l’injustice, il vous a dit : « Marche !… marche !… sans trêve ni repos, et ta marche sera vaine, et chaque soir, en te jetant sur la terre dure, tu ne seras pas plus près du but que tu ne l’étais le matin en recommençant ta course éternelle… ». Ainsi, depuis les siècles, des hommes impitoyables ont dit à l’artisan… « Travaille !… travaille… travaille…