Page:Sue - Martin l'enfant trouvé, vol. 5-6.djvu/189

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— Dam !… Monsieur… je ne l’ai pas regardé beaucoup…

Soudain la porte s’ouvrit ; Robert de Mareuil avança la tête et dit :

— Balthazar… tu peux rentrer.

Le poète entra.

Je restai seul, frappé de la pâleur de la figure de Robert et de la sombre expression de sa physionomie ; mais bientôt je vis sortir Balthazar, la figure rayonnante, l’œil étincelant de joie ; il me mit plusieurs pièces d’argent dans la main, et me dit :

— Tu vas aller tout de suite au bureau de tabac de cette rue… tu demanderas au buraliste cinq timbres… rappelle-toi bien cela : cinq timbres de dix mille francs chacun, ce qui fait cinquante mille francs… comprends-tu ?

— Oui, Monsieur… je demanderai cinq timbres de dix mille francs chacun, ce qui fait cinquante mille francs, — dis-je avec stupeur, car j’ignorais complètement alors l’existence du papier timbré, sa valeur relative, et je croyais avoir à rapporter réellement cinquante mille francs.

— Il est donc bien entendu, — reprit Balthazar, — que tu vas me rapporter tout de suite cinq timbres de dix mille francs chacun, et que tu les paieras ?

— Et avec quoi ? Monsieur, — m’écriai-je avec ébahissement.

— Comment ? avec quoi ? mais avec l’argent que je viens de te donner.

— Avec cela, Monsieur… — lui dis-je, — payer cinquante mille francs ?