Page:Sue - Martin l'enfant trouvé, vol. 5-6.djvu/268

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mieux valu pour moi rester en prison quatorze ans que de vivre comme j’ai vécu… dans l’opulente maison du milord-duc.

Effrayé de l’expression de Basquine, lorsqu’elle prononça ces derniers mots, je m’écriai :

— Tu as donc été retenue par force auprès de cet homme ?

— Non… — me dit-elle — j’y suis restée volontairement.

Et comme je paraissais ne pas comprendre la contradiction de ses paroles, Basquine continua :

— Avant de te citer l’aventure de Louis le Bien-Aimé j’en étais restée, je crois, à ma présentation au milord-duc ; vêtue d’une magnifique toilette enfantine, portant ma belle poupée d’une main, je donnai l’autre à ma gouvernante ; et nous traversâmes d’abord une magnifique galerie de tableaux, puis des salons tous plus splendides les uns que les autres, et nous arrivâmes à l’appartement particulier du milord-duc ; à l’exception de ses deux valets de chambre de confiance, aucun des gens de la maison ne pénétrait jamais dans ces appartements. Ma gouvernante s’arrêtant avec moi devant une porte recouverte de velours rouge, sonna d’une façon particulière ; l’un des deux hommes de confiance nous ouvrit, il échangea quelques mots en anglais avec miss Turner, qui me remit alors aux mains de ce nouveau personnage et me dit : « — Corso (c’est le nom de ce valet de chambre italien) va vous conduire auprès de monseigneur, soyez bien sage, comportez-vous comme une petite lady bien élevée et souvenez-vous de tous mes conseils. » — La porte se referma sur ma gouvernante, je restai seule avec