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prince de Montbar pouvaient résulter pour Régina de nouveaux malheurs.

Faut-il enfin avouer un rêve qui me semblait alors presque insensé ?… je songeais souvent qu’ayant, par ma condition chez le docteur, quelque accès dans la maison de la princesse de Montbar, je pourrais peut-être un jour entrer à son service… Et alors… de quels soins, de quelle vigilance, de quelle ardente sollicitude n’aurais-je pas entouré ma maîtresse !

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Le docteur Clément était un homme de soixante ans environ, de taille moyenne ; il avait la tête énorme, une forêt de cheveux crépus couvrait son vaste front souvent contracté par un froncement de muscles tout léonin ; l’ensemble de son visage sombre, tanné, était disgracieux, d’une expression dure, presque farouche ; pourtant ses yeux, d’un bleu pur et doux, quoique à demi couverts par d’épais sourcils noirs toujours hérissés, avaient parfois l’expression la plus douce et la plus touchante… De formes rudes, acerbes, le docteur, toujours vêtu avec une négligence sordide, portait invariablement de grosses bottes à cœur par-dessus un pantalon à pied de drap gris ; une longue redingote bleue râpée, un gilet noir et une cravate blanche roulée en corde autour de son cou. Il se présentait ainsi chez les personnages les plus considérables et même les plus augustes qui acceptaient discrètement les excentricités de cet homme illustre, car son savoir et ses succès pratiques comme médecin et comme chirurgien étaient immenses.

Je n’oublierai jamais la première journée que je passai auprès du docteur Clément ; il m’emmena de l’Hôtel-