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Page:Sue - Martin l'enfant trouvé, vol. 7-8.djvu/337

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Basquine fut si rapide, que Scipion ne s’en aperçut pas… Loin de là, car bien qu’il fût habitué à l’éclat de la beauté de Basquine, jamais peut-être cette beauté ne lui avait paru plus merveilleuse et surtout plus voluptueusement agaçante ; aussi, à l’aspect de Basquine, frémissant d’amour, de désirs, il s’écria d’une voix triomphante :

— J’ai gagné !… Mon père viendra demain… Vous dicterez les conditions de mon mariage avec Raphaële.

— Ah ! démon… — dit Basquine, en se jetant au cou de Scipion, et l’enlaçant de ses bras charmants.

— Êtes-vous content, diable rose ? — répondit le vicomte en serrant pour ainsi dire entre ses dix doigts cette taille fine et ronde, tandis que, emportée par son impatiente ardeur, il cherchait de ses lèvres la bouche de Basquine ; mais celle-ci sut échapper à ce baiser, et quoique toujours retenue par Scipion, elle se rejeta si vivement en arrière et un peu de côté, que, grâce à sa souple cambrure, elle se plia pour ainsi dire en deux sur l’un des bras du jeune homme ; puis, restant renversée à demi dans cette pose, digne du provoquant abandon de l’Érigone antique, elle attacha sur les jeux de Scipion ses grands yeux humides, voilés, mourants… pendant que ses lèvres vermeilles, exhalant un soupir embrasé, laissaient voir, en s’entr’ouvrant, le blanc émail de ses dents.

Un nuage passa devant la vue de Scipion ; ses joues s’enflammèrent ; enivré, éperdu, se penchant vers Basquine, il lui dit d’une voix palpitante… avide :