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grand’peine. M. Duriveau, non content de perpétuer ces foyers pestilentiels, force ses métayers à vivre dans les horribles demeures qu’il leur construit avec de la boue et du chaume aux endroits les plus malsains de sa terre, sombres et humides tanières où ces misérables prolétaires des champs deviennent forcément fiévreux et perclus, jusqu’à ce qu’une mort prématurée les décime[1].

Est-il une autorité, une loi quelconque qui puisse empêcher cet homme de rendre homicide ce qui devrait être salutaire, stérile ce qui devrait être fécond ? Non, cet homme dispose à sa guise d’une fraction du sol de la France.

Et pourtant, voyez l’anomalie étrange :… Qu’à la ville une maison quelque peu borgne ou boiteuse empiète d’un pied sur une rue large de trente ou qua-

  1. De rares mais bien honorables exceptions confirment la généralité des faits : — feu M. Vincent Gaillard a le premier introduit, dans une partie de la Sologne, le boisement en sapins du nord et en sapins d’Écosse, sur une vaste échelle. Ces plantations ont assaini et fertilisé un sol jusqu’alors stérile et malsain. — Plus tard, M. de Lorges, non content de pratiquer la plus large charité, a exécuté d’immenses défrichements, et rendu de notables services à la même contrée par la généreuse impulsion qu’il a donnée à l’agriculture. M. Ménard, ex-notaire à Baugency, tente aussi les plus intelligentes améliorations agricoles en les appuyant sur les idées fécondes et pleines d’avenir de l’association et du socialisme. Mais ces exemples, si respectables qu’ils soient, ne sont que des exceptions, ne se rattachant à aucun de ces larges systèmes dont l’initiative ne peut être prise que par un état social constitué sur des bases radicalement démocratiques, parce que lui seul pourrait donner une satisfaction entière et légitime aux représentants de ces trois éléments de toute richesse : travail — intelligence — capital.