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HISTOIRE DES CANADIENS-FRANÇAIS

par cinq religieuses de même zèle et charité que les précédentes, qui assistent utilement la colonie. Toutes ces maisons de charité ont besoin qu’on leur en fasse, plus l’hôpital de Québec que les autres. Si le roi leur accorde, cette année, par forme d’aumônes, quelques gratifications, et permette que dans les vaisseaux qui seront par lui envoyés en Canada, elles puissent faire porter dix ou douze tonneaux de denrées à leur usage, et à celui des pauvres du pays, sans payer, elles s’en sentiraient bien obligées. »

Talon ne parle des dîmes qu’en passant. C’était toutefois l’une des principales questions du jour. L’édit qui fixait cette redevance au treizième du revenu soulevait des mécontentements. L’automne de 1666, Mgr de Laval, écrivant au souverain pontife, disait que les Canadiens se refusaient à la payer, et il ajoutait, dans cette lettre que M. l’abbé Faillon a découverte à Rome : « Cette année, cependant, la nécessité, ou le vice-roi M. de Tracy, les obligera à la payer. C’est un homme puissant en œuvres[1] et en paroles ; il autorise la vie chrétienne par son exemple, en prend hautement la défense[2] et nous[3] espérons beaucoup de bien de son séjour en Canada, s’il plaît au ciel de nous le conserver. » Il fallut, cependant, que Mgr de Laval se résignât à composer ; il proposa de réduire la dîme au vingtième, mais les agitations continuèrent. Dépité, il voulut revenir au treizième. Les syndics des habitants et les capitaines des côtes (capitaines de milice) remontrèrent contre cette mesure, ce qui détermina Tracy, Talon et Courcelles à la fixer à la vingt-sixième, considérant que même la vingtième serait encore trop pour un pays nouveau. Ils déclarèrent de plus (1667) que le propriétaire d’une ferme ne payerait point de dîmes durant les cinq premières années de la concession, afin qu’il pût défricher plus aisément. Il était entendu que ceci pourrait être changé lorsque le pays serait mieux établi. Le propriétaire et le fermier devaient payer à proportion de ce que chacun d’eux retirerait, soit en grain, soit en argent.

À Montréal, les censitaires des messieurs de Saint-Sulpice, voulant reconnaître la générosité de leurs seigneurs et curés, décidèrent que, pendant trois ans, la dîme serait fixée au vingt et unième pour les gerbes de blé et au vingt-sixième pour les autres grains[4].

Dans les années 1666-1669, arrivèrent de France les pères jésuites Jacques Bruyas, Étienne de Carheil, Jacques Marquette, Louis de Beaulieu, Jean Pierron, Guillaume Mathieu, Pierre Milet et Louis André ; les sulpiciens venus de 1667 à 1669 sont François Fillon, François de Salignac de Fénelon, Claude Trouvé, René de Brehaut de Galinée, François-Saturnin Lascaris d’Urfé, Joseph Mariet, Louis-Armand de Cicé, Isidore Mercadier, et (1669) Pierre de Caumont, prêtre.

Au printemps de 1669, Louis XIV donna ordre de permettre aux récollets d’envoyer de leurs religieux en Canada. Les quatre premiers qui partirent furent retardés par des accidents de mer et durent retourner en France après avoir relâché en Portugal.

  1. Pas dans la guerre contre les Iroquois !
  2. En faisant payer la dîme à coup de bâton ?
  3. Mgr de Laval et les jésuites.
  4. Édits et Ordonnances, II, 45. Faillon, Hist. de la colonie, III, 165-6.