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90 COMMENCEMENT DE LA GUERRE ANGLO-FRANÇAISE.

proposition de Danton, la dépêche fut déposée parmi les actes du procès, et le résultat des votes fut proclamé.

Sur sept cent vingt et un membres présents, trois cent soixante et un, c’est-à-dire la stricte majorité absolue, avaient voté pour la mort; vingt-six, tout en se déclarant pour la mort, avaient demandé s’il ne conviendrait pas, par des considérations politiques, de surseoir a l’exécution; treize avaient fait du sursis la condition de la sentence de mort; trois cent vingt et un avaient voté pour la détention ou pour d’autres peines (1). Les Jacobins avaient tout lieu d’être satisfaits; il était évident que la terreur qu’inspiraient leurs menaces dominait l’Assemblée. Ils n’en exigèrent que plus impérieusement qu’on écartât le dernier obstacle, lesursis proposé.Tallien ne rougit pas de demander, avec une sensibilité affectée, qu’on ne prolongeât pas les angoisses de Louis XVI; Robespierre, qui ne songeait guère que ce même homme, toujours par un sentiment d’humanité, demanderait un jour sa propre mort, se joignit à lui. On débattit cette question pendant toute la journée du 18, etla soirée était déjà fort avancée lorsque le président leva la séance, sans que rien fût encore décidé. Les plus hardis d’entre les Montagnards témoignèrent l’intention de rester réunis et de s’emparer du gouvernail des affaires. Cette fois, leurs bandes dévouées pénétrèrent dans la salle même une discussion confuse et tumultueuse s’établit et se prolongea jusqu’après minuit, au milieu de ténèbres presque complètes. Cependant, Sant.erre ayant assuré aux masses agitées que leur victime ne leur échapperait pas le lendemain, on se sépara, après une courte délibération des chefs, en se promettant de se trouver à l’œuvre et au grand complet aux premières lueurs du jour. Le 19, on vit clairement que si la majorité avait paru hésiter la veille, ce n’était pas par un retour vers l’indépendance, mais seulement par un dernier reste de pudeur. L’appel, qui ne se termina qu’après minuit, donna trois cent dix voix en faveur du sursis et trois cent quatre-vingts contre. La décision était absolue et irrévocable

Jetons ici un dernier regard sur le Temple. Depuis plusieurs semaines déjà Louis XVI était préparé à la mort, car il ne (1) D’après la liste révisée le 18.