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Page:Tabourot - Les Bigarrures et Touches du seigneur des Accords - 1640.djvu/123

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ment amoureuse de leurs beaux pendans, j’en voudrois avoir l’un pour grand cas : Le mary, du premier coup pensa que la femme parloit d’autres pendants, & de ceux dont elle eust esté encor plus amoureuse, si elle les eust veu.

Un President d’assez bonne paste, voyant les deux fils d’un sien Collegue nouvellement mariez, lesquels long-temps auparavant il n’avoit veu, leur dit en une bonne compagnie, sans y mal penser comme je croy. N’estes-vous pas tels & tels ? Il-me semble (dit-il) quant à vous addressant sa parole au plus jeune, que vous estes Jean : Sur ce l’aisné print la parole, & dit Monsieur, c’est moy qui suis Jean. Dont chacun, qui cognoissoit qu’il estoit vrayement, & de nom & d’effect, eut depuis occasion d’engausser.

À Dijon au mois de May, chacun an l’on a coustume par privilege exprés, de mener sur l’asne les maris qui battent leurs femmes, où il se fait tres-belle assemblée de plusieurs voisins & autres masquez en fort brave appareil : Or il s’en fit un par l’infanterie qui fut fort superbe, l’an mil cinq cens quatre vingts & trois, d’un estrange qui battit sa femme auquel comme chacun accouroit de curiosité pour le voir, entr’autres un de longue robbe bien eschauffé, le cherchoit de ruë en ruë. Lequel estant rencontré par deux Damoiselles, l’interrogerent, Où allez vous Monsieur. Je cherche l’asne, dit il. Sur celuy fut respondu, Nous l’avons trouvé, Monsieur. Je croy qu’il cogneut bien apres, que l’on avoit ainsi parlé pour la rencontre de luy-mesme.

Quelqu’un voyant en place marchande aller des CC deux, à deux, disoit,

Hos brevitas sensus fecit conjungere binos.

Quand on voit deux bestes parler ensemble, on le