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LA FIN DU GOUVERNEMENT RÉVOLUTIONNAIRE


et qu’aujourd’hui on emploie l’armée ; mais, sauf la différence des figurants, la représentation qui s’achève n’est qu’une reprise, et le même drame, joué une première fois le 2 juin, vient d’être joué, le 18 Fructidor, une seconde fois[1].


VI

Ainsi recommence le régime de 1793, la concentration de tous les pouvoirs publics aux mains d’une oligarchie, la dictature exercée par une centaine d’hommes groupés autour de cinq ou six meneurs. — Plus indépendant, plus autocrate et moins provisoire que l’ancien Comité de Salut public, le Directoire s’est fait attribuer le droit légal de mettre une commune en état de siège et d’introduire des troupes dans le cercle constitutionnel[2], en sorte que désormais il peut, à discrétion, violenter Paris et le Corps législatif. Dans ce corps mutilé par lui et surveillé par ses sicaires[3],

  1. Lord Malmesbury’s Diaries, III, 559 (17 septembre 1797). — À Lille, après la nouvelle du coup d’État, « il était curieux de voir l’horreur qui régnait partout, à l’idée que le régime de la Terreur allait recommencer… Les gens avaient l’air de voir approcher un ange exterminateur… Au théâtre, les acteurs partageaient l’impression commune. Le directeur, nommé Paris, dit à Ross qui le payait : Nous allons positivement être vandalisés. »
  2. Décrets du 18 et du 19 fructidor an V, article 39.
  3. Thibaudeau, II, 277 : « J’allai donc à la séance du 10 fructidor. Les avenues de l’Odéon étaient assiégées de ces agents subalternes de révolution qui se montrent toujours après les mouvements, comme les oiseaux carnassiers après les batailles. Ils insultaient et menaçaient les vaincus, et exaltaient les vainqueurs. »